24 juin 2025

EN BREF
- Au moment où il a demandé de l’aide, Jeremy, ancien combattant, vivait dans sa voiture et se sentait complètement désespéré.
- La Homes For Heroes Foundation a fourni à Jeremy un logement sûr et sécuritaire, une collectivité solidaire et, surtout, de l’espoir pour l’avenir.
- Les villages Homes For Heroes offrent des logements abordables, du soutien et des ressources pour aider les anciens combattants à traiter et à gérer les traumatismes, tout en faisant la transition vers la vie civile.
- Aujourd’hui « diplômé » de la Homes For Heroes Foundation, Jeremy offre du soutien aux autres anciens combattants qui vivent dans ces villages.
Jeremy avait beaucoup de choses à penser en tant qu’artilleur des Forces armées canadiennes en Afghanistan, comme miser sur son entraînement en cas d’attaque, assurer la sécurité de ses compagnons d’armes et s’en sortir vivant. Ce à quoi il ne s’attendait pas, c’est qu’un jour, il serait en situation d’itinérance et qu’il vivrait dans sa voiture.
La route a été difficile, mais il peut enfin se concentrer sur de nouveaux horizons grâce au soutien qu’il a reçu de la Homes For Heroes Foundation.
Un plan de carrière qui a déraillé
Jeremy, qui a maintenant 43 ans, a été déployé en Afghanistan d’octobre 2009 à mai 2010. Il faisait partie des quelque 40 000 militaires canadiens qui ont servi là-bas entre 2001 et 2014 pour stabiliser le pays et combattre le régime extrémiste des talibans.
« Nous avons perdu quelques compatriotes pendant notre affectation, et d’autres ont été blessés », déclare Jeremy, ajoutant qu’il souffre du trouble de stress post-traumatique (TSPT). Nous nous sommes retrouvés dans quelques situations de combat... des journées difficiles. J’ai perdu un de mes bons amis là-bas. »
Après sa période de service, Jeremy s’est engagé à poursuivre sa carrière militaire. Il s’est également marié et a emménagé en Alberta pour travailler au Centre canadien d’entraînement aux manœuvres (CCEM) à la Base des Forces canadiennes (BFC) de Wainwright. Il y a passé sept ans jusqu’à son départ en 2019 en raison d’une grave blessure au dos qu’il décrit comme « un coup massif ». « Je voulais tellement rester dans l’armée », ajoutant que c’était comme perdre sa famille.
Son mariage avait pris fin quelques années plus tôt. Il a emménagé à Edmonton dans l’espoir de trouver un emploi ou d’aller à l’école et de s’y bâtir une vie. La pandémie de COVID-19 a rendu tout cela difficile. Lorsque ses prestations d’invalidité ont pris fin, Jeremy a emménagé avec une amie et sa famille.
« Ça n’a pas fonctionné. J’avais un TSPT non diagnostiqué et j’étais déprimé. J’avais énormément de problèmes de santé mentale. Je savais que je m’enfonçais. Je ne voulais plus leur faire subir ça. »

L’aide appropriée au bon moment
Jeremy a quitté la maison de son amie à l’été 2023. Sans abri, vivant dans sa voiture et se sentant complètement désespéré, Jeremy a communiqué avec Veterans Emergency Transition Services (VETS) Canada, puis avec la banque alimentaire de l’Association des anciens combattants, où on l’a mis en contact avec la Homes For Heroes Foundation.
La Fondation existe pour que les anciens combattants des Forces armées canadiennes, dont bon nombre ont mérité des médailles pour leur service, ne se retrouvent pas sans abri.
On m’a offert un logement et aidé lorsque j’étais au plus bas.
Brad Field, président-directeur général de la fondation, explique que l’histoire de Jeremy n’est malheureusement pas rare. Selon les estimations actuelles, jusqu’à 10 000 anciens combattants canadiens qui ont servi leur pays vivent maintenant en situation d’itinérance.
Brad souligne que, dans bien des cas, les problèmes auxquels font face les anciens combattants sans abri sont semblables à ceux des civils en situation d’itinérance. Il peut s’agir de traumatismes, d’enfances instables, de dépendances, de problèmes de santé mentale et physique. L’expérience vécue lors d’un déploiement peut toutefois s’ajouter à ces problèmes.
« Les choses qu’ils ont dû faire au service de leur pays ou les choses dont ils ont été témoins peuvent exacerber ces effets traumatiques, affirme M. Field. Les handicaps physiques sont aussi un élément important et, bien sûr, la toxicomanie est à l’avant-plan. »
Autres défis auxquels font face les anciens combattants :
- Retourner chez soi après avoir été éloigné de sa famille et de ses amis, et constater que les choses ont changé.
- Retourner dans des situations familiales difficiles ou des perspectives d’emploi médiocres.
- Gérer des responsabilités telles que cuisiner, faire la lessive, payer les factures, ce qui est particulièrement un enjeu pour ceux qui sont entrés dans l’armée juste après leurs études secondaires.
- Ne pas avoir de pièces d’identité délivrées par le gouvernement, ne pas avoir les renseignements ou les compétences nécessaires pour ouvrir un compte et obtenir du crédit auprès d’institutions financières.
Certains vétérans peuvent même se retrouver à la rue avec à peine plus que l’argent d’une pension militaire ou d’une prestation d’invalidité.
Nous reconnaissons l’effort qu’il faut aux personnes qui ont servi leur pays pour demander de l’aide. C’est un énorme pas, surtout pour celles provenant du milieu militaire.
D’autres éprouvent de la honte ou de la culpabilité, notamment lorsqu’ils retournent auprès d’amis ou de membres de leur famille qui ne sont pas d’accord avec certains efforts militaires.
« Après avoir servi votre pays et, dans certains cas, dans le pire environnement possible, et avoir accompli l’inimaginable, être considéré comme un héros et devoir ensuite admettre que vous êtes incapable de subvenir à vos besoins, ou que vous avez besoin d’aide, c’est lourd à porter ».
Créée en 2018, la fondation a pour mission de mettre fin à l’itinérance chez les anciens combattants. Pour ce faire, elle leur procure un logement et leur offre des ressources et des services pour faciliter leur transition vers la vie civile.
À ce jour, la fondation a construit trois villages Homes For Heroes, soit 20 habitations à Edmonton, 15 à Calgary et 20 à Kingston. D’autres travaux d’aménagement sont prévus à Winnipeg et à London cette année. Des discussions sont en cours pour construire des villages à Hamilton, Toronto et Ottawa ainsi qu’à d’autres endroits sur les côtes Est et Ouest du Canada.

Sécurité, soutien et camaraderie
Pour la plupart des anciens combattants, la durée du séjour varie de 6 à 24 mois.
Les loyers et les coûts des services publics sont maintenus à un niveau abordable. De plus, des travailleurs sociaux sont disponibles dans les centres de ressources pour offrir du soutien aux anciens combattants, dans leur transition vers la vie civile. Il peut s’agir d’une aide à l’accès aux services de santé, aux prestations sociales, aux programmes de formation et d’éducation, ainsi qu’aux compétences de la vie courante comme faire un budget et cuisiner.
Être avec d’autres anciens combattants qui comprennent ce qu’ils vivent est également essentiel, explique M. Field. « C’est très important, et c’est le fondement de la façon dont on conçoit nos villages. C’est une collectivité dans laquelle nos anciens combattants peuvent se rassembler et partager leurs histoires et parler de leurs expériences respectives. »
Jeremy est d’accord. Dans les villages Homes for Heroes, la camaraderie que les anciens combattants peuvent trouver lorsqu’ils sortent de leur habitation est cruciale.
« L’une des choses dont je me suis rendu compte lorsque j’ai quitté l’armée, c’est que pendant les 13 années où j’étais militaire, il y avait toujours quelqu’un pour surveiller mes arrières. Je savais que la personne à côté de moi avait suivi la même formation que moi et qu’elle partageait certaines de mes expériences. Les autres savaient ce que j’avais vécu. À l’extérieur du milieu militaire, je n’avais plus ce soutien. »
Donner au suivant
Après avoir passé huit mois dans un logement de Homes for Heroes à Edmonton, Jeremy a pu se remettre sur pied et a trouvé un emploi à temps partiel. Il est l’un des quelque 90 « diplômés » du programme. Jeremy dit qu’il sera « éternellement reconnaissant » d’avoir eu un endroit où vivre, du soutien en santé mentale, de l’accompagnement pour mettre ses affaires en ordre et des gens qui l’ont « écouté », tout simplement.
« Je me suis découvert de nouveau », explique Jeremy, qui redonne au programme en travaillant comme bénévole pour soutien ses pairs.
Il prévoit retourner aux études pour obtenir un diplôme en travail social dans l’espoir de transformer son appréciation du programme Homes For Heroes en une carrière à temps plein.

« Les difficultés qu’ils vivent, je les ai vécues. Les deux travailleurs sociaux chargés des cas ici font la majeure partie du travail. Mon rôle, c’est de leur dire « Hé, je suis passé par là moi aussi ».
L’un des anciens combattants que Jeremy soutient est Arthur, 42 ans, qui a servi de 2008 à 2023, lorsque des blessures l’ont obligé à quitter. En août 2024, Arthur a emménagé dans un logement Homes For Heroes, autrefois occupé par Jeremy.
Un jour ou l’autre, je devrai me débrouiller seul... mais au moins, pendant un certain temps, je peux compter sur Homes for Heroes pour m’apporter la réponse dont j’ai besoin
Arthur dit que sans Homes for Heroes, il n’aurait pas d’endroit où vivre. Il a passé la plus grande partie de sa carrière à la BFC de Shiloh, au Manitoba. Sa main gauche a été écrasée par de la machinerie lourde au travail. Il a aussi subi des blessures au dos et à la poitrine. En raison de cafouillages avec sa pension et ses prestations d’invalidité, Arthur a été temporairement sans revenu et il vivait avec sa famille d’accueil à Edmonton.
« Je souffre toujours énormément. Je ne pouvais pas travailler. J’avais l’impression d’être un énorme fardeau pour ma famille d’accueil. »
Arthur a préféré partir plutôt que de nuire à sa relation familiale, mais il n’avait nulle part où aller. Trouver un logement avec Homes For Heroes a été un « grand soulagement », ajoutant que l’organisme l’a aidé à présenter une demande de pension militaire et de prestations médicales, et à accéder à des services de réadaptation.
« Un jour ou l’autre, je devrai me débrouiller seul, explique Arthur, mais au moins, pendant un certain temps, je peux compter sur Homes for Heroes pour m’apporter la réponse dont j’ai besoin ».
FAITS SAILLANTS
- La Homes For Heroes Foundation est soutenue par le Fonds d’innovation pour le logement abordable.
- Ce fonds vise à soutenir les nouvelles idées qui entraîneront des changements et perturberont le secteur – des idées et des approches qui feront évoluer le secteur du logement abordable et créeront la prochaine génération de logements au Canada.
- La ville d’Edmonton, la Province de l’Alberta et des donateurs privés ont également fourni du financement, du soutien et des ressources.